Au sommet de nos hautes montagnes, les randonneurs peuvent entendre des bruits inquiétants, sentir un souffle paralysant ou encore se faire surprendre par un éboulis de gravas…. La météo seule coupable ? Mais si c’était le forfait de quelques êtres secrets ?

Il était une fois, dans les montagnes majestueuses des Pyrénées-Atlantiques, des génies malveillants qui protégeaient jalousement leur domaine. Ces êtres célestes étaient d’une nature sombre et féroce, et ils ne toléraient aucun mortel qui oserait fouler leur territoire. Les habitants de Lescun les craignaient plus que tout autre chose, car leur colère se manifestait sous forme d’orages dévastateurs qui balayaient tout sur leur passage.
Le Yona Gorri, l’être habillé couleur de feu, était le plus redouté de tous. Il résidait au sommet de la montagne d’Aurie, d’où il pouvait surveiller toute la région. Les gens de la vallée le considéraient comme le seigneur des cieux, le maître absolu de l’éclair et du tonnerre. Tout étranger qui osait s’aventurer sur son territoire provoquait sa colère.
Le Yona Gorri devenait alors furieux et se vengeait en lançant des orages dévastateurs sur la plaine. Le Lescunois savait qu’il valait mieux ne pas défier la colère de ce dieu des montagnes….

Sur le pic d’Anie se trouvait un autre génie, d’une nature plus solitaire et inhospitalière. Sa taille dépassait celle du plus haut sapin, et il cultivait un jardin sur le haut du pic, où croissaient des végétaux dotés de puissances surnaturelles. La liqueur qui en découlait avait le pouvoir de décupler les forces des hommes et d’éloigner les démons gardiens des trésors cachés dans les caves et les vieux châteaux.
Les étrangers qui voulaient cueillir les plantes de son jardin ou visiter la demeure du génie étaient immédiatement confrontés à d’effroyables tempêtes… Ce génie était un gardien féroce de ses terres, et il ne tolérait aucune intrusion sur son territoire.
Les habitants de la vallée d’Aspe avaient également leur propre génie des montagnes, dont ils craignaient les terribles effets de la colère.
Cet être formait et dissipait les tempêtes, conservait les sources et les fontaines, gardait les mines d’or et les cavernes de cristaux et chassait avec un bruit effrayant à travers les précipices. Il maltraitait parfois les hommes qui osaient escalader les rochers sur lesquels il avait établi son empire.
Les histoires les plus terrifiantes circulaient à son sujet, et il était considéré comme un être mystique et mystérieux, dont la colère ne pouvait être évitée.
Un jour, un vieux pâtre des Ormonts raconta l’histoire d’un jeune berger fougueux qui aimait partir à la chasse du chamois.
Malgré les mises en garde de ses parents, il se laissait emporter par cette passion dangereuse. Un soir, alors qu’il se trouvait au cœur des précipices les plus redoutables, une violente tempête s’abattit sur lui : la neige et la grêle tourbillonnaient autour de lui, lui faisant perdre toute notion de direction. Épuisé, effrayé, affamé et transi de froid, il s’allongea sur un rocher.

Soudain, l’Esprit de la montagne, celui qui gouvernait ces lieux mystiques, apparut devant lui dans un tourbillon tumultueux. Sa voix puissante retentit dans la nuit glaciale : « Téméraire ! Qui t’a donné la permission de tuer les troupeaux qui m’appartiennent ? Je ne viens pas chasser les vaches de ton père, alors pourquoi viens-tu chasser mes chamois ? Je te pardonnerai une fois de plus, mais ne reviens jamais ici. »
Sur ces mots, l’Esprit fit cesser la tempête, ramena le jeune berger sur le chemin de son chalet et disparut dans les brumes épaisses des montagnes. Dès lors, le jeune homme comprit la sagesse des paroles de l’Esprit de la montagne et ne quitta plus jamais son troupeau.
Les habitants de la vallée d’Aspe racontent encore aujourd’hui cette histoire et en tremblent, conscients des puissants esprits qui habitent les montagnes les plus inaccessibles.
Source : Croyances, Mythes et Légendes des Pays de France, P.Sébillot Illustration générée par Midjourney
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